Selon l’Agence BIO, un enfant sur quatre a déjà eu un repas bio dans sa cantine scolaire en 2008, et 78 % des parents d’enfant qui n’en ont pas bénéficié en ont manifesté le désir. Cependant, si elles restent rares, les cantines incluant quotidiennement du bio au menu prolifèrent. Phénomène de mode ou prise de conscience collective, parents et professionnels sont de plus en plus nombreux à œuvrer en faveur de ces nouvelles cantines, où le changement ne concerne pas seulement la nourriture.
Si certaines mairies à l’instar de celle de Paris subventionnent des repas bio ponctuels, seules 0,1 % des cantines sont bio à proprement parler. Si une « cantine biologique » ne fait pas l’objet d’une définition légale, la fédération nationale des agriculteurs biologiques des régions de France (FNAB) a défini dans une charte les valeurs qu’elle souhaite partager avec la restauration collective : des valeurs économiques, écologiques, mais aussi sociales et humanistes. En plus de se procurer des denrées issues de l’agriculture biologique, elle préconise également un comportement écologique consistant à acheter des fruits et légumes de saisons, de préférence de production locale. Les établissements qui s’y tiendront instaureront une scission avec les établissements classiques, qui servent des repas trop riches en protéines, manquant de crudités et où les fromages très gras rivalisent avec de douteuses crèmes pistache.
Certaines cantines ont relevé le défi de se donner les mêmes objectifs que la FNAB, prouvant aux autres établissements que le coût n’est pas nécessairement, contrairement aux a-priori, plus élevé en mangeant mieux.
Écotidien a rencontré Annick Philippon, cuisinière à la cantine de Viuz-la-Chiesaz, où l’ambiance est agréable, la cuisine excellente et les aliments bio à plus de 50 % (en particulier l'épicerie sèche, les céréales, la farine, l’huile…), un taux nettement supérieur aux 15 % escomptés pour la France en 2010 à l’issue du Grenelle de l’environnement.
Seule à gérer depuis 10 ans la centaine de repas quotidiens des écoles primaire et élémentaire de Viuz-la-Chiesaz, Annick Philippon cuisine sur place pour les jeunes élèves des menus de grande qualité, sains, équilibrés et, selon le personnel et les élèves, délicieux. Si les produits biologiques sont présents dans les assiettes, Annick privilégie aussi la proximité, qui comporte des avantages économiques et écologiques. « Je travaille beaucoup avec l’agriculture raisonnée, par exemple pour ce qui est des pommes de terre ». Et bien sûr, Annick ne conçoit pas d’adopter ce comportement sans y inclure un enjeu pédagogique : « Je privilégie les légumes de saisons et explique aux enfants pourquoi je choisis des tomates ou du chou au menu. » Elle leur apprend aussi le tri sélectif, la consommation responsable et de nouvelles saveurs grâce à des « petits déjeuners pédagogiques » et à de succulents mets quotidiens, comme par exemple sa « soupe de pois cassés bio et ravioles grillées au jus de noix ». Et s’il est important pour Annick de faire découvrir de nouvelles saveurs aux élèves, c’est aussi parce que les parents ont rarement le temps de s’en préoccuper : « La cantine a aujourd’hui pour rôle de faire connaître des plats qui ont disparu de la vie familiale, faute de temps. »
Au niveau tarif, sa cantine se trouve parmi les moins chères du canton. Le secret d’Annick ? Rééquilibrer la composition des repas avec, par exemple, une diminution de la viande souvent servie en excès, comme elle l’a appris au cours des formations qu’elle a suivies, et s’adresser aux producteurs locaux. Pour d’autres établissements, le conseil général, pour les collèges, le conseil régional, pour les lycées et les mairies, pour le primaire peuvent subventionner des repas bio, dont le coût de revenu sera de 0,48 à 0,60 euro plus cher. Ainsi, le prix est sensiblement le même pour les familles. Avec la contribution de ces institutions, les tarifs ne sont pas plus onéreux, mais dans la plupart des cas, les établissements gèrent eux-même cette augmentation.